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Thème 6  SEMAINE par LAURENCE POISSY




Lundi :


Ou le dernier jour de dilettantisme que je m’autorise dans mon travail. J’ai passé la journée à rectifier des erreurs dans mes fichiers. De mauvaises manipulations et la précipitation en sont la cause. Désormais je saurais prendre le temps nécessaire à chaque tâche, quitte à dire non à une demande supplémentaire. La mortification n’est pas ma tasse de thé, mais les échecs aussi me font avancer. Ils me poussent à passer à la vitesse supérieure. Ce qui me bloque est la manifestation du mépris de mes capacités.

Je resterai toutefois «dilettante» à la manière du personnage féminin de ce merveilleux film français dont j’ai oublié le nom du réalisateur et avec Catherine Frot dans le rôle titre. Je veux garder la légèreté, que j’ai durement acquise, dans tous les domaines possibles de ma vie.



Mardi :


La famille est un thème auquel je pense très souvent. Notamment à l’histoire de la mienne. Mes origines, comme celles de chacun se perdent dans le mouvement des multitudes. La mémoire, chez nous a un sens particulier car nous sommes juifs. Le début de notre histoire se cache, en Roumanie, dans les brumes de l’oubli, pensez ! Il est seulement quatre générations dont j’ai des souvenirs tangibles. Avant, c’est le flou le plus total traversé de bribes éparses et confuses. J’ai hérité du côté sombre, pogroms, déportation, vie cachée mais n’étant pas pratiquante, tout le côté festif m’a échappé. Mes ailes je les ai créées sous peine de sombrer, au moment où j’ai compris que la vie a aussi un côté lumineux, et l’amour de mes parents, parfois maladroit m’a toujours soutenue.

Qu’en est-il pour cet homme allongé à même le carrelage au bout du quai, direction porte de Clignancourt, ce matin comme tous les autres matins ?

Un pauvre carton l’isole du froid, une couverture SNCF cache son visage au regard des voyageurs. De vieux sacs de supermarchés sont posés à ses pieds et une bouteille vide a roulé un peu plus loin. Je me demande comment il a abouti là, absolument seul. Sans famille.

Ce soir, c’est le spectacle de fin d’année de l’école. Mes parents manqueront une réunion importante pour accompagner leur petite fille. Mon mari a le regard brillant. Mon père a l’œil vissé à son camescope pendant toute la prestation de Manon dont la fierté est visible. Ma mère la regarde avec son petit sourire en coin et Léna, la cadette amuse la galerie avec son babillage. Je pense à ma sœur qui va venir bientôt…

Les contrastes dans une journée sont saisissants.


Mercredi :


Il est le dernier de mon congé parental. Mes filles m'ont fait le plaisir de me laisser dormir jusqu’à dix heures, attendant patiemment mon réveil devant la télévision.

J'ai reçu de mon amie C., une rose de son jardin et mes cookies préférés qu'elle a fait pour me consoler. Les goûters pris en sa compagnie et celle de nos enfants vont me manquer ! Je n’ose imaginer ce que sera une semaine passée sans pouvoir lui parler de mes petits égarement et de mes joies. Sans compter que je vais passer un jour de moins avec mes petites louves aux dents carnassières mais aux baisers si doux.

Ce fût une étrange journée, comme si mes proches s'étaient donné le mot. Toutes mes entreprises, ménage ou loisir furent interrompues.

Par la voisine qui avait besoin que je la véhicule.

Par les coups de téléphone. Ceux-des nièces de mon mari celles que je préfère, dont I'une à un petit garçon né le même jour que moi et qui m’ont confié leurs peines et leur bonheur, j’aime ça. Celui de ma tata préférée qui m'a appelée pour, me parler de I’atelier d'écriture que j'ai manqué hier, cet atelier qui pour moi est une ouverture sur un univers que j'ignorais.

Les petites tâches quotidiennes m’ont paru sympathiques et légères, à moi qui suis plutôt une femme d'extérieur. Pourtant je me suis fixé comme objectif de vider la corbeille de linge à repasser dans les jours qui suivent.


Jeudi :


Jour férié, chômé, par opposition à ouvré. Ces mots sont désuets, mais le contenu des deux premiers est une gourmandise dont on ne se lasse pas. On les débusque dans le calendrier, on fait des combinaisons savantes avec d'autres formes de congés pour avoir un maximum de temps libre. Le grand art ensuite, est de savoir les mettre à profit pour des activités toutes personnelles, de ne pas les perdre bêtement avec des gens que I'on n'a pas vraiment envie de voir ou des tâches «obligatoires». On rêve d'un feu dans l'âtre, d'un câlin douillet, d'un bon bouquin et on se retrouve chacun dans un coin de la maison occupé à des activités différentes voire contraignantes. Les enfants, qu'on adore, la maison qu'on a voulue nous font un peu oublier qu'avant tout ça on était deux avec des projets communs. Gare, ou bien ne resteront que les projets !


Vendredi :


C'est le pont. Et I'idée de tout mon travail en souffrance m'accompagnera toute la journée, sans pour autant me gâcher le plaisir d'être chez moi et d'échapper au rythme du quotidien.


Samedi :


École et courses, ménage et famille, loisirs et famille… L’équation est délicate à résoudre en ce premier jour de week-end.

Et là, patatras alors que je suis vaillamment en train de vider la corbeille de repassage, Léna tombe dans l’escalier, celui de béton. Manon hurle qu’il n’est pas question qu’elle aille dehors avant la fin des Pokémon et Alain étend le linge en pestant que « quand même y-en-a beaucoup à plier et qu’il faut encore passer l’aspirateur, ranger le salon (salle de jeu permanente) et… »

Et là, je pense à ma séance de cinéma du dimanche soir avec mon amie préférée et je me dis qu’avec Alain, mon mari, on se combine une vie bien agréable ensemble… et séparément.

Ma conclusion :

1. Chacun a ses capacités,  ses envies et ses limites

2. Le ménage est secondaire

3. La vie est belle


Dimanche :


Le temps qu’il fait est une obsession nationale, voire mondiale ?… Présentateur de la météo est poste de choix dans les médias et certains journaux lui font la part belle avec cartes en couleurs et commentaires pleine page. Au fond, qu’il pleuve ou qu’il vente, la belle affaire ! Chaque journée me semble maintenant précieuse, par son contenu et pas par sa couleur. C’est comme la couleur des gens qui est un détail au regard de l’humanité, une petite différence chromosomique tellement négligeable !

   Les sujets futiles occupent toujours le premier plan de la narration des évènements. Tous les abus commis par l’Homme sur l’Homme sont ravalés au rang du sensationnel, du bavardage et peu de temps est consacré à la véritable lutte contre ceux-ci.

La lumière s'éteint. Je me cale dans mon fauteuil après avoir enlevé mes chaussures et j'entame avec plaisir mon cône glacé en bonne compagnie devant l'écran du cinéma.

Au fait, j'ai atteint avec brio I'objectif que je m'étais fixé, vous savez, la corbeille de linge à repasser. Elle est vide.


LAURENCE POISSY


  

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