Légende d'Héna
Brillante est la lune,
Grand est le bûcher,
Immense est la foule.
Eugène Sue,
Les Mystères du peuple
La tribu de Karnak est cette nuit en fête ;
Sur le Cromleck désert sont de rouges lueurs,
Et les bardes, autour du bûcher qui s'apprête,
Ont commencé les chœurs.
La blonde Héna, bien jeune encore
Songeait, sous l'effrayante aurore,
Qui se lève à l'île de Sen.
Elle était jeune, elle était belle.
C'est pourquoi le destin appelle
La fille de Joël le Bren.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Bien long sera donc ton voyage ?
Dit sa mère. — Il est éternel,
Je vais plus loin que tout rivage
Où l'on n'entend plus nul appel ;
Il faut que la fleur soit broyée
Pour rendre le parfum puissant ;
Je sais que comme une rosée
La terre doit boire mon sang.
Qu'importe, quand la coupe est pleine.
Où sont les grappes de raisin ?
Les épis qui couvrent la plaine
Sous la meule mêlent le grain.
Je vais où l'on coupe la gerbe !
Je vais où l'on foule le vin,
Où l'on fauche l'herbe avec l'herbe,
Où l'on fait le vin et le pain.
La tribu de Karnak est toute sur la grève ;
Sur le Cromleck désert sont de rouges lueurs,
Et les bardes, autour du bûcher qui s'apprête,
Ont terminé les chœurs.