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Louise MICHEL

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GERMINAL, LA LÉGENDE FUTURE

                                               Fragment




Tout dormait dans la nuit et dans l’ombre profonde.

À peine si le vent faisait frissonner l’onde

                   Ou froissait le roseau ;

Et dans l’immense paix, les ifs du cimetière

Murmuraient doucement : il fait bon sous la terre,

                   Ô morts, dans les tombeaux.


Sous l’herbe haute et verte où sont les moissons blondes

Germant comme le blé, sous les bois, sous les ondes,

                   Tout change et se confond,

Et la vie et la mort, ─ néant de toutes choses,

Poussière qui renaît au calice des roses

                   Et dans l’humus fécond.


Le temps, dans ce creuset que tout recouvre d’ombre,

Amoncelle sans fin êtres et jours sans nombre ;

                   Tout va se transformant,

Et le protoplasma, sous les vagues mouvantes,

Et les groupes humains et les sphères ardentes

                   Dans le grandissement.


Comme en des océans à la fin de leur route,

Les êtres en mourant y tombant goutte à goutte,

                   Et sans se souvenir :

Et l’éternité mêle au creuset où tout passe

Les plantes et la chair, les êtres et la race ;

                   Tout change sans finir.


Un fluide, peut-être ainsi qu’une atmosphère,

Revêt pour quelques jours les êtres et la sphère,

                   Dispersés par la mort ;

Il s’en va dans l’espace avec le dernier râle,

Dans l’espace où tournoie et la matière astrale,

                   Et la vie à plein bord.


Comment voulons-nous donc, dans quand tout change sans cesse

Régler tout l’univers sur notre petitesse !

                   Quoi ! serions-nous donc sourds ?

Il n’est point d’autre loi que celle d’harmonie ;

Chaque note, chaque être a, sans qu’on l’y convie,

                   Heure et place toujours.


Dans le noir infini, tous les groupes d’étoiles

S’attirent librement, voguant à pleines voiles,

                   Et sans fin et sans bord ;

Nulle main ne conduit les soleils dans l’espace ;

Ainsi tout groupe humain et tout être a sa place,

                   Sa note de l’accord.