À ceux qui m'ont élevée
Abandonnés à l'ombre en un coin solitaire,
Là-bas sous les sapins ils dorment, et jamais
Nul ne vient arracher l'herbe rongeant la pierre,
Ou voir si l'arbre encor de son feuillage épais
Recouvre la tranchée ouverte la dernière.
Moi je m'en vais toujours où la prison m'enserre ;
Je vais sans savoir où, comme la feuille au vent,
Et nul rameau ne tombe ou de rose ou de lierre
Sur leurs os refroidis, et jamais sur la terre
Nul ami ne réveille un bruit sourd en marchant.
Rude est l'hiver là-bas; longtemps les fleurs du givre
Fleurissent comme en mai les branches ; et le vent
Mugit dans la forêt avec un son de cuivre,
Ou pareil à des voix se roule en gémissant.