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PREMIÈREMENT

IX



             Où la vie se contemple tout est submergé

             Monté les couronnes d'oubli
             Les vertiges au cœur des métamorphoses
             D'une écriture d'algues solaires
             L'amour et l'amour.

            
             Tes mains font le jour dans l'herbe
             Tes yeux font l'amour en plein jour
             Les sourires par la taille
             Et tes lèvres par les ailes

             Tu prends la place des caresses

             Tu prends la place des réveils.




X




            Si calme la peau grise éteinte calcinée

            Faible de la nuit prise dans ses fleurs de givre
            Elle n'a plus de la lumière que les formes.


            Amoureuse cela lui va bien d'être belle

            Elle n'attend pas le printemps

            La fatigue la nuit le repos le silence

            Tout un monde vivant entre les astres morts

            La confiance dans la durée

            Elle est toujours visible quand elle aime.




XI




                     Elle ne sait pas tendre des pièges

                     Elle a les yeux sur sa beauté

                     Si simple si simple séduire

                     Et ce sont ses yeux qui l'enchaînent

                     Et c'est sur moi qu'elle s'appuie

                     Et sur elle qu'elle jette

                     Le filet volant des caresses.




XII




Le mensonge menaçant les ruses dures et glissantes

Des  bouches  au  fond  des  puits  des  yeux  au  fond des nuits

Et des vertus subites des filets à jeter au hasard

Les envies d'inventer d'admirables béquilles

Des faux des pièges entre les corps entre les lèvres

Des patiences massives des impatiences calculées

Tout ce qui s'impose et qui règne

Entre la liberté d'aimer

Et celle de ne pas aimer

Tout ce que tu ne connais pas.




XIII




Amoureuse au secret derrière ton sourire

Toute nue les mots d'amour

Découvrent tes seins et ton cou

Et tes hanches et tes paupières

Découvrent toutes les caresses

Pour que les baisers dans tes yeux

Ne montrent que toi tout entière.




XIV




                    Le sommeil a pris ton empreinte

                    Et la colore de tes yeux.




XV




                    Elle se penche sur moi

                    Le cœur ignorant

                    Pour voir si je l'aime

                    Elle a confiance elle oublie

                    Sous les nuages de ses paupières

                    Sa tête s'endort dans mes mains

                    Où sommes-nous

                    Ensemble inséparables

                    Vivants vivants

                    Vivant vivante

                    Et ma tête roule en ses rêves




XVI




                  Bouches gourmandes des couleurs

                  Et les baisers qui les dessinent

                  Flamme feuille l'eau langoureuse

                  Une aile les tient dans sa paume

                  Un rire les renverse.




XVII




                   D'une seule caresse

                   Je te fais briller de tout ton éclat.




XVIII



    Bercée de chair frémissante pâture

    Sur les rives du sang qui déchirent le jour

    Le sang nocturne l'a chassée

    Echevelée la gorge prise aux abus de l'orage

    Victime abandonnée des ombres

    Et des pas les plus doux et des désirs limpides

    Son front ne sera plus le repos assuré

    Ni ses yeux la faveur de rêver de sa voix

    Ni ses mains les libératrices.


    Criblée de feux criblée d'amour n'aimant personne

    Elle se forge des douleurs démesurées

    Et toutes ses raisons de souffrir disparaissent.





  

L'AMOUR  LA POÉSIE

Paul ÉLUARD

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