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JE ME SUIS RETIRÉ D'UNE AFFAIRE


Je me suis retiré d'une affaire pas ordinaire

Sans rien emporter, et nu comme un ver

Sans rien qui me presse, mais l'heure était venue

Et les monts bleus lâchent d'autres affaires.


Nous apprenons beaucoup dans les livres,

Mais les vérités volent au vent des paroles.

"Nul n'est prophète en son pays !"

Mais nos voisins les ignorent aussi.


Ils m'ont écartelé mais ceux que j'ai nommés

Ont bien reçu de moi la part du lion,

Mes talons dérapent sur le parquet glissant,

Je grimpe l'escalier et me retrouve au grenier.


Les prophètes disparus ne se retrouvent plus

Zarathoustra et Mahomet sont à jamais partis

Nul n'est prophète en son pays

Mais les voisins les ignorent aussi.


À l'office courent les caquets indifférents

"Ça va mieux maintenant, il est parti à temps !"

J'arrache aux portraits leurs toiles d'araignées

Et je rejoins en courant les chevaux enfin sellés.


Son visage est apparu et face à lui j’ai bondi ;

Il m'a dit d'une voix nette et triste :

"Nul n'est prophète en son pays !"

Mais nos voisins les ignorent aussi.


Je saute en selle mon corps devient cheval,

Sous moi le cheval tombe, et je m'emballe,

Je me suis retiré d'une affaire pas ordinaire

Et les monts bleus lâchent d'autres affaires.


Je bondis, sous le cheval crissent les épis,

Et sous leur crissement s'élève un cri :

"Nul n'est prophète en son pays !"

Mais nos voisins les ignorent aussi.

  

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Vladimir VISSOTSKI