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Page VERHAEREN Emile 1

DIALOGUE DEVANT LA TÉLÉ


Oh, Vania, regarde un peu ces charlots,

Et leur bouche comme un calicot,

Et la peinture sur leur museau,

Et leur voix de poivrot !


Oh, Vania, c'est ton beau-frère, ce gars,

Lui tout craché avec sa trogne d'alcolo

Oh, regarde, mais regarde donc, Vania,

Je mens pas, regarde ça !!


— Zina, touche pas au beau-frère !

C'est pas le Pérou, mais c'est la famille !

Et t'as oublié la peinture et la fumée

Sur ta grosse bille !


Pourquoi tu bavasses? À l'entracte,

Zina, tu te carapates en bas.

J'irai tout seul, si tu veux pas!

Allons, Zina, remue-toi !


— Oh, Vania, regarde ces nabots,

Du vrai jersey leurs maillots,

C'est pas ma boîte de rigolos

Qui en ferait d'aussi beaux !


Dis donc, Vania, tes bons copains

C’est vraiment pas le gratin !

Toujours blindés dès le matin,

Toujours pleins !


— Mes copains, c’est pas des aristos,

Mais pour la famille, c'est du costaud !

S'ils boivent des cochonneries,

C'est par économie !


Mais dis-moi un peu, Zina, ton copain,

Qu'on vient de virer de ton turbin,

C'est au pétrole qu'il faisait le plein

Ton petit pote, hein ?


— Oh, Vania, regarde ces perroquets !

Ah ! J'en peux plus, je hurle, ouais !

Oh ! Qu'il est beau, ce maillot,

Vania, je le voudrais !


À la fin du mois, pas vrai, Vania,

Tu m'en ramènes un super bath ;

Pourquoi toujours "après" et "après" ?

Vania, je craque !


— Zina, tu ferais mieux de la fermer !

Ma prime du mois, on me l'a sucrée !

Qui m'a dénoncé au contremaître ?

Toi ? J'ai lu la lettre.


Et puis regarde-toi, Zina ! Ce maillot,

Si tu l'enfiles, t'auras l'air charlot !

Il t'en faudrait des mètres carrés !

Et l'argent, où je vais le trouver ?


Oh, Vania, les acrobates ! Des malins,

Oh, comme il cabriole, le galopin !

Satikov, le chef d'atelier, ce matin

Il galopait comme ce lapin !


Ivan, quand tu rentres à la maison,

Tu manges et tu t'affales sur le divan...

Ou tu gueules quand t'es à jeun.

Tu cherches quoi, Ivan ?


— Zina, me force pas à être grossier,

Zina, tu cherches à m'offenser !

Toi, tu te les roules toute la journée,

T'arrives, et hop, devant la télé !


Alors comprends-moi bien, Zina,

Je file dare-dare au bistrot du coin ;

Là-bas c'est plein de bons copains,

Je suis pas seul quand je bois !


  

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Vladimir VISSOTSKI