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Le 20 octobre 1941à Nantes, le lieutenant-colonel Holtz, commandant de la place, est abattu. À Paris, le général Stülpnagel ordonne de fusiller cinquante otages. Ce n’est pas la première fois que les nazis exécutent des patriotes. Mais il s’agit maintenant de représailles de masse. De masse, mais pas aveugles.
Le 21 octobre, le chef du bureau du sous-préfet de Châteaubriant part pour Paris avec un dossier de 200 noms. Pierre Pucheu, ministre de l’Intérieur de Pétain, va choisir 27 noms. Les autres seront choisis dans d’autres lieux de détention.
Mais qui est Pierre Pucheu ? Administrateur des fonderies de Pont-à-Mousson, des aciéries de Micheville, fondateur du Cartel international de l’acier, il est l’un des plus éminents représentants de ce qu’on appelait alors le Comité des forges et de cette bourgeoisie qui, après le triomphe de Hitler, entend prendre sa revanche sur le Front populaire. Pucheu, donc, choisit. Politiquement.
Charles Michels, secrétaire général des cuirs et peaux CGT ; Jean-Pierre Timbaud, dirigeant de la métallurgie CGT ; Jean Poulmarch, dirigeant du syndicat des produits chimiques CGT ; Jules Vercruysse, dirigeant du textile CGT ; Désiré Granet, dirigeant du papier-carton CGT ; Jean Grandel, secrétaire de la fédération postale CGT… Les autres sont professeurs, étudiants, ouvriers. Presque tous sont communistes et nombre d’entre eux sont des élus. Charles Michels est député de Paris, Granet est adjoint à Vitry, Grandel est maire de Gennevilliers.
Guy Môquet, dix-sept ans, le fils du député communiste de Paris Prosper Môquet. Pucheu choisit.
Louis Aragon a raconté les dernières heures des otages. Guy a écrit sur les planches de son baraquement : « Vous tous qui restez, soyez dignes de nous, les vingt-sept qui allons mourir. »
Le 22 octobre dans la carrière de la Sablière, il faisait beau à n’y pas croire. À quoi Guy pensait-il avant de s’évanouir ? Au ciel bleu, à ses parents, à Odette, rencontrée au camp et au baiser d’amour qu’elle lui avait promis ?
Lui qui aimait la poésie, connaissait-il les vers de Rimbaud ?
Vous êtes amoureux, loué jusqu’au mois d’août
Vous êtes amoureux, vos sonnets la font rire
Tous vos amis s’en vont, vous êtes mauvais goût
Puis l’adorée un soir a daigné vous écrire !
Ce soir-là… vous rentrez aux cafés éclatants,
Vous demandez des bocks ou de la limonade…
On n’est pas sérieux quand on a dix-sept ans
Et qu’on a des tilleuls verts sur la promenade.
Guy Môquet est le seul à avoir été cité à l'ordre de la Nation.
Le 28 décembre 1944, le Général De Gaulle lui décerne la médaille de la Résistance française et la Croix de Guerre.
Aragon dédie à : « Gabriel PERI et Honoré d’Estienne d’ORVES comme à Guy MOQUET et Gilbert DRU », la Rose et le Réséda, paru dans la clandestinité, dont le vers célèbre
Celui qui croyait au ciel celui qui n'y croyait pas
Tous deux adoraient la belle prisonnière des soldats
Celui qui croyait au ciel celui qui n'y croyait pas
Tous les deux étaient fidèles des lèvres du coeur des bras